La patience de ma tendre soeur (dossier)

Publié le par 3ilm.char3i - La science legiferee

La patience de ma tendre soeur (dossier)

Louange à Allâh, en abondance, pour Son décret.

 

C'est à Lui qu’appartient ce qu’Il a repris comme ce qu’Il a donné, et toute chose auprès de Lui est fixée à un terme déterminé et j’atteste qu’il n’y a de divinité digne d’être adorée qu’Allâh, seul, sans associé, et j’atteste que Mohammed est Son serviteur et Son Messager.

 

Qu’Allâh prie sur lui, sur sa famille et sur l’ensemble de ses compagnons, et qu’Il leur accorde le salut.

 

Ceci étant dit :

 

Allâh a certes promis aux endurants de leur accorder leur récompense sans compter, comme Il – exalté soit-Il – a dit (traduction rapprochée) :

 

﴾Les endurants auront leur pleine récompense sans compter.﴿ [ Az-Zumar : 10 ]

 

Al-Awzāʿī – qu’Allâh lui fasse miséricorde – a expliqué :

 

« Il ne sera pas établi pour eux de pesée ni de mesure ; la récompense leur sera plutôt accordée de manière abondante. »

 

Et je pense — sans pour autant prétendre purifier quiconque auprès d’Allâh — que ma noble et précieuse sœur, Nūrah bint ʿAbd al-Muḥsin al-Badr, née dans la ville d’az-Zulfi, le troisième jour du mois de Shaʿbān de l’année 1379 (1) de l’hégire, fait partie des croyantes patientes, comptant sur la récompense d’Allâh, et espérant ce qu’Il y a auprès de Lui.

 

Or, ce qu’Il y a auprès de Lui ‒ exalté soit-Il ‒ est meilleur et plus durable.


Les épreuves et douleurs de la maladie l’ont atteinte il y a plus de vingt ans.

 

Durant toute cette période, elle fut éprouvée par des tumeurs cancéreuses qui se déplaçaient dans son corps : chaque fois qu’elle traitait une zone avec les traitements chimiques destructeurs et qu’elle en guérissait, la maladie réapparaissait ailleurs, jusqu’à ce qu’à la fin de sa vie, elle atteigne sa tête de manière si étendue que les médecins se trouvèrent sans recours ni traitement possible, si ce n’est la prescription d’antalgiques pour atténuer l’intensité de la douleur et apaiser quelque peu sa souffrance.

 

Tout au long de cette période, elle fut patiente, pleine d’espoir en la récompense, sans jamais s’affliger ni manifester de mécontentement face au décret d’Allâh.

 

Parmi les choses étonnantes la concernant : elle réconfortait ceux-là mêmes qui venaient la consoler, et elle apaisait ceux qui souffraient pour son état et compatissaient à sa condition.

 

Je pense – et Allâh est plus Savant – qu’elle possédait une immense certitude en Allâh, et une profonde confiance en Sa promesse faite à celui qui place en Lui son espoir et son attente.

 

Dans ses derniers jours, alors qu’elle était au comble de la douleur, elle aperçut l’une de ses filles souffrante [de la voir ainsi], et lui dit : « Tout ce qui arrive au croyant est un bien. »

 

Elle réconfortait aussi ceux qui étaient à son chevet, en disant : « Le Prophète صلى الله عليه وسلم a dit (concernant le croyant) : "Même l’épine qui le pique, Allâh expie par elle une part de ses fautes." »

 

L’une de ses filles l’entendit un jour – au plus fort de sa maladie, alors qu’elle allait et venait entre inconscience et éveil – réciter (traduction rapprochée) :

 

﴾N’est-ce pas Lui qui répond à l'homme en détresse quand il L’invoque, et qui enlève le mal, et qui vous fait succéder sur la Terre, génération après génération.﴿ [ An-Naml : 62 ]

 

Puis elle perdit connaissance un moment, avant de reprendre ses esprits et d’achever le verset, en répétant (traduction rapprochée) :

 

﴾Y a-t-il donc une divinité avec Allâh ? C’est rare que vous vous rappeliez !﴿. [ An-Naml : 62 ]

 

Elle multipliait les louanges et les éloges envers Allâh, et L’implorait sans cesse de lui offrir une belle fin et de la faire mourir alors qu’Il est satisfait d’elle.

 

Abū Dāwūd rapporte dans ses Sunan, et Aḥmad dans son Musnad, que le Prophète صلى الله عليه وسلم a dit :

 

« Lorsqu’Allâh a destiné à un serviteur un rang qu’il ne peut atteindre par ses œuvres, Il l’éprouve dans son corps, dans ses biens, ou dans ses enfants, puis Il lui accorde la patience jusqu’à ce qu’Il le fasse parvenir au rang qu’Il lui avait destiné. »

 

Et j’espère d’Allâh, le Très- Généreux, qu’elle occupe auprès de Lui une position élevée dans les Jardins des délices.

 

Elle était dévouée envers ses parents et bienfaisante à leur égard, entretenant avec eux des liens constants.

 

Elle veillait à leur rendre visite régulièrement, même au plus fort de sa maladie, et, lorsqu’elle en était empêchée, elle les appelait, prenait de leurs nouvelles, suivait de près leur état de santé, recommandait à ses frères et sœurs de prendre soin d’eux, et exprimait le souhait sincère d’être proche d’eux.

 

Parmi les marques de bienfaisance qu’elle leur a témoignées : elle avait recommandé, avant sa mort, d’être transportée à Médine pour qu’on y accomplisse la prière funéraire sur elle, ceci afin de ne pas imposer à ses parents le fardeau du voyage après son décès.

 

Elle savait bien qu’ils n’auraient jamais renoncé à sa prière mortuaire, malgré les difficultés que cela leur aurait causées.

 

Et Allâh lui a facilité ce qu’elle avait souhaité, et son transfert s’effectua d’une manière étonnamment aisée.

 

En effet, son décès survint après la prière du ʿAṣr, et la prière funéraire fut accomplie sur elle à la mosquée du Prophète صلى الله عليه وسلم après la prière du Fajr.

 

Elle fut ensuite portée jusqu’à sa tombe — une tombe de bien, de miséricorde, de bienfaisance et d’agrément, avec la permission d’Allâh —, accompagnée par une foule nombreuse parmi les témoins d’Allâh sur Sa terre.

 

Le premier à l’avoir accompagnée fut son père, qui s’approcha de sa tombe porté sur son fauteuil roulant, participa à son inhumation, puis se tourna vers Allâh pour invoquer en sa faveur le pardon, la miséricorde et le raffermissement.

 

À son arrivée à Médine, au milieu de la nuit, nous l’avons conduite au domicile de ses parents, et nous l’y avons laissée un temps, pour qu’ils puissent l’embrasser, lui faire leurs adieux, et la contempler une toute dernière fois, un adieu que nous espérons, par la permission d’Allâh, être suivi d’une rencontre et d’un rassemblement dans les hauteurs du Firdaws (traduction rapprochée) :

 

﴾Ceux qui auront cru et que leurs descendants auront suivis dans la foi, Nous ferons que leurs descendants les rejoignent. Et Nous ne diminuerons en rien le mérité de leurs œuvres﴿ [At-Tur : 21 ]

 

J’étais auprès d’elle au moment de son décès.

 

Immédiatement après avoir rendu l’âme, son visage s’éclaircit et s’illumina, affichant un doux sourire et une lueur admirable.

 

En le regardant, on ne pouvait qu’être émerveillé.

 

C’était comme s’il n’avait jamais connu la fatigue, la peine ou l’épreuve.

 

Je pense que cela est un signe de la bonne nouvelle faite aux croyants, lorsque les anges descendent vers eux au moment de la mort (traduction rapprochée) :

 

﴾N’ayez pas peur et ne soyez pas affligés mais ayez la bonne nouvelle du Paradis qui vous était promis.﴿ [Fussilat : 30 ]

 

Plus d’un exégète a dit : « Cela se produit au moment de la mort. »

 

Dans le long hadith d’al-Barāʾ ibn ʿĀzib qu’Allâh l’agrée, il est rapporté que les anges disent à l’âme du croyant :

 

« Sors, ô toi l’âme pure, qui étais dans un corps pur.

Sors en étant louée, et reçois la bonne nouvelle de la miséricorde, des parfums (du Paradis), et d’un Seigneur qui n’est pas en colère contre toi. »

 

Parmi les anecdotes : Notre père — qu’Allâh le préserve — avait l’habitude de la taquiner souvent à l’âge adulte, en lui disant : « Récite-nous la sourate al-Fajr ! »

 

Car lorsqu’elle était une petite fille, elle récitait sa fin de cette manière [enfantine] : « wa-dḥalī fī ʿibādī, wa-dḥalī dannatī » [au lieu de : « wa- dkhulī fī ʿibādī, wa-dkhulī jannatī »].

 

J’espère d’Allâh, le Très-Généreux, Seigneur du Trône sublime, Détenteur de l’immense faveur et du don abondant, qu’Il réalise pour elle ce qu’elle a récité de Sa Parole, dans son enfance comme à l’âge adulte, dans l’espoir de la miséricorde de son Seigneur, et dans l’ardent désir d’obtenir Sa grâce.

 

Elle n’a pas pu suivre une scolarité académique durant son enfance ; elle a plutôt étudié dans des écoles traditionnelles coraniques, où elle a appris à lire et à écrire.

 

Dès son plus jeune âge, elle lut et mémorisa une partie du Coran.

 

Elle a d’ailleurs été mon enseignante, puisque c’est avec elle que j’ai appris la lecture et l’écriture ; elle me traçait des points que je devais relier avec mon stylo afin d’apprendre à former les lettres et les mots.

 

Je n’ai cessé depuis d’apprendre à ses côtés, profitant de son expérience et de sa sagesse.

 

Je lui disais souvent : « Tu es ma première maîtresse et ma première enseignante. »

 

Quant à son attention portée à l’instruction et à l’éducation de ses enfants, c’était là une chose vraiment admirable.

 

Il y avait entre elle et moi des concertations ainsi que des échanges de conseils et de rappels.

 

Elle me confiait ses préoccupations et me consultait dans ses affaires les plus personnelles.

 

Nous n’avons jamais cessé de rester en contact, et chaque fois que je me rendais à Riyad pour une affaire ou un besoin, j’allais chez elle ; je ne dormais là-bas que dans sa maison.

 

Je lui disais toujours : « Ta maison est pour moi un pilier, une référence. Je ne peux venir à Riyad sans y passer. »

 

Elle est décédée avant ses parents.

 

Lorsque la nouvelle de sa mort parvint à notre mère — qu’Allâh la préserve —, celle-ci dit : « Ma fille m’a devancée. »

 

Mais elle a remporté — oui, par Allâh ! — leurs invocations, leurs supplications insistantes auprès d’Allâh جل جلاله afin qu’Il lui accorde Son agrément, qu’Il la comble de Son pardon, et qu’Il l’élève aux plus hauts degrés du Paradis.

 

Et l’invocation d’un parent en faveur de son enfant est exaucée.

 

Félicitations à elle, encore et encore, pour l’obtention de ce bien, de cette grâce et de cette générosité divine !

 

J’atteste, quant à moi, qu’elle est morte alors que ses deux parents étaient satisfaits d’elle, l’aimaient profondément et ressentaient une grande compassion à son égard.

 

Et après sa mort, ils n’ont cessé d’invoquer en sa faveur.

 

Notre mère tenait à lui rendre visite lorsque sa maladie s’aggrava, mais ma sœur disait : « Efforcez-vous de l’en dissuader », par compassion envers elle, de peur qu’elle ne la voie dans un état de souffrance extrême et de difficulté intense.

 

En réalité, lorsque sa maladie s’intensifia, elle n’autorisait plus que ses fils, ses filles, son époux et son frère ʿAbd ar-Razzāq à entrer auprès d’elle, à l’exclusion des petits- enfants.

 

L’une de ses filles — par bienfaisance — lui rappelait le [mérite du] pardon envers les gens et l’immense récompense de ceux qui pardonnent auprès d’Allâh.

 

Elle l’écoutait alors, oscillant entre évanouissement et conscience.

 

Puis elle perdit connaissance.

 

À son réveil, elle dit (traduction rapprochée) :

 

﴾Mais quiconque pardonne et réforme, son salaire incombe à Allâh﴿ [As-Shura : 40 ]

 

Qu’Allâh, par ce pardon, l’élève en honneur et en degré auprès de Lui.

 

Durant les dernières semaines, je lui rendais visite régulièrement, et je ne la voyais préoccupée par rien d’autre que ses enfants, — qu’Allah les réforme, les bénisse et leur accorde la bienfaisance envers leur mère après sa mort, comme Il leur avait accordé de le faire de son vivant, et même davantage —

 

Il arrivait qu’elle me demande de rester seul avec elle, alors que la maladie s’intensifiait, pour me consulter, me demander conseil, et surtout me confier ses recommandations les concernant.

 

Ils occupaient dans son cœur un amour profond, une place immense et une attention toute particulière.

 

Je pense — qu’Allâh augmente leur réussite — qu’ils sont à un haut niveau de bonté et de bienfaisance.

 

Je lui ai dit un jour, alors que la maladie s’était intensifiée et que je voyais la grande attention  que  ses  filles  lui  portaient : « Félicitations à toi ‒ mā shāʾ Allāh ‒ pour ces filles ! »

 

Elle répondit aussitôt : « Et les garçons ?! Louange à Allâh, ils sont tous un bien et une faveur. »

 

Elle persévérait beaucoup, dans les derniers jours de sa vie, à répéter les cinq formules du monothéisme (tawḥīd) mentionnées dans le hadith rapporté par Ibn Mājah dans ses Sunan, d’après al-Agharr Abū Muslim, qui témoigna avoir entendu Abū Hurayrah et Abū Saʿīd — qu’Allâh les agrée — témoigner que le Messager d’Allâh صلى الله عليه وسلم a dit :

 

« Lorsque le serviteur dit : “Il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allâh, et Allâh est le Plus Grand (Lâ ilâha illa Allâh, wa-Allâhu Akbar)”,

Allâh — Puissant et Majestueux— dit : “Mon serviteur a dit vrai : il n’y a de divinité digne d’adoration que Moi, et Je suis Allah, le Plus Grand.”

 

Et lorsqu’il dit : “Il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allâh Seul (Lâ ilâha illa Allâhu waḥdah)”,

Allâh dit : “Mon serviteur a dit vrai : il n’y a de divinité digne d’adoration que Moi seul.”

 

Et s’il dit : “Il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allâh, et Il n’a point d’associé (Lâ ilâha illa Allâh, lâ sharîka lah)”,

Il dit : “Mon serviteur a dit vrai : il n’y a de divinité digne d’adoration que Moi, et Je n’ai point d’associé.”

 

Et s’il dit : “Il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allâh, à Lui la royauté et à Lui les louanges (Lâ ilâha illa Allâh, lahu al-mulku wa lahu al-ḥamd)”,

Il dit : “Mon serviteur a dit vrai : il n’y a de divinité digne d’adoration que Moi, à Moi la royauté et à Moi les louanges.”

 

Enfin, s’il dit : “Il n’y a de divinité digne d’adoration qu’Allâh, et il n’y a de force ni de puissance qu’en Lui (Lâ ilâha illa Allâh, wa lâ ḥawla wa lâ quwwata illâ bi-Llâh)”,

l dit : “Mon serviteur a dit vrai : il n’y a de divinité digne d’adoration que Moi, et il n’y a de force ni de puissance qu’en Moi.” »


Abū Isḥāq rapporte ensuite qu’al-Agharr dit une chose qu’il ne comprit pas.

 

Il demanda donc à Abū Jaʿfar [qui était également présent lorsqu’al-Agharr rapporta ce hadith] : « Qu’a-t-il dit ? » Et il lui répondit : « Celui à qui ces paroles sont accordées au moment de sa mort, le Feu ne le touchera pas. »

 

Ce hadith a également été rapporté par at-Tirmidhī dans le chapitre : Ce que dit le serviteur lorsqu’il est malade, avec la formulation suivante : « Il disait : Quiconque les prononce pendant sa maladie, puis meurt, le Feu ne le touchera pas. »

 

Et an-Nassāʾī l’a rapporté avec l’ajout suivant : « Il les comptait au nombre de cinq avec ses doigts. »

 

Et dans une autre version, il est dit : « Allâh atteste de la véracité du serviteur au sujet de cinq paroles qu’il prononce. »

 

Puis il les mentionna toutes.

 

Al-Mubārakfūrī ‒ qu’Allah lui fasse miséricorde ‒ a dit dans Al-Mirʿāt :

 

« Dans ce hadith, il y a une preuve que si le serviteur prononce les paroles qui y sont mentionnées durant sa maladie, et qu’il meurt de cette maladie sur ces paroles — c’est-à-dire qu’elles furent ses derniers mots prononcés, en pleine conscience et de manière volontaire —, alors le Feu ne le touchera pas, ses péchés antérieurs ne lui nuiront pas, et ces paroles expieront toutes ses fautes. »

 

Je lui avais envoyé, quelque temps auparavant, un de mes articles intitulé : « Cinq paroles : celui à qui elles sont accordées au moment de sa mort, le Feu ne le touchera pas. »

 

Elle porta alors une grande attention à ces paroles, et les répéta abondamment durant ses derniers jours.

 

Ce furent précisément ces paroles qui scellèrent sa vie.

 

Les dernières paroles que l’on entendit d’elle furent : « Ô mon Seigneur… ! (Yā Rabbī)» Mais ce qu’elle demanda ne fut pas entendu.

 

J’espère qu’il s’agit là d’un bien immense réservé pour elle auprès du Très Généreux, le Donateur, le Bienfaiteur, Celui qui comble de Ses bienfaits.

 

Ô Allâh !

 

Pardonne-lui, élève son degré, élargis sa tombe et éclaire-la.

 

Prends soin de sa famille après elle.

 

Inscris-la auprès de Toi parmi les bienfaisants.

 

Place son livre dans le registre des vertueux [ʿIlliyyīn].

 

Ne nous prive pas de sa récompense, ne nous éprouve pas après elle.

 

Et rassemble-nous avec elle, ainsi qu’avec nos parents, dans le plus haut degré du Firdaws.

 

Elle avait demandé à ses enfants dévoués — garçons et filles — d’écrire quelque lignes retraçant sa vie, son parcours, sa maladie, ses épreuves, sa patience, et ce qu’ils avaient pu observer d’étonnant dans ses états et son comportement.

 

Ils ont écrit ce qui suit : « Louange à Allâh qui a fait de la mort et de la vie une épreuve, comme Il l’a dit dans Son Livre parfaitement clair :


﴾afin de vous éprouver et de savoir qui de vous est le meilleur en œuvre﴿ [Al-Mulk : 2 ]

 

Louange à Allâh, qui accorde à Ses serviteurs le raffermissement et la patience, qui a fait des épreuves une porte vers la récompense et le pardon, et du malheur un moyen d’élévation en degrés, comme l’a dit le Messager d’Allâh صلى الله عليه وسلم :

 

« L’ampleur de la récompense est à la mesure de celle de l’épreuve.

Et lorsqu’Allâh aime un peuple, Il l’éprouve : celui qui s’en montre satisfait obtiendra l’agrément, et celui qui s’en irrite subira la colère. »

 

Que les prières soient sur le Prophète élu, lui qui vécut orphelin, enterra ses propres filles, vit périr ses proches bien- aimés, et endura tant d’épreuves...

 

Il patienta pour Allâh sans jamais fléchir !

 

Et que les prières soient également sur sa famille et l’ensemble de ses compagnons.

Cela étant dit :

 

C’est donc avec des cœurs croyants, satisfaits du décret d’Allâh et de Sa prédestinée, que nous avons fait nos adieux à notre chère défunte et noble mère, Nūrah bint ʿAbd al- Muḥsin al-Badr, qui s’en est allée rejoindre la proximité d’Allâh l’Immense, après une existence pleine de patience, d’agrément et d’un cœur croyant au décret d’Allâh et en Son destin.

 

Elle laisse dans le cœur de ses proches un vide impossible à combler, et une blessure qui ne se refermera jamais…

 

Et comment les larmes ne couleraient-elles pas pour celle qui fut si bienfaisante en tant que mère, si dévouée en tant que fille, si tendre en tant que sœur, celle qui a laissé dans chaque cœur une empreinte dont le souvenir ne s’éteindra jamais ?

 

Notre consolation est qu’elle a laissé derrière elle une vie empreinte de noblesse, et qu’elle est partie vers Celui qui est plus miséricordieux envers elle que nous-mêmes, vers le Reconnaissant, qui récompense Ses serviteurs vertueux, vers Celui qui a dit dans Son Livre :

 

﴾vraiment Nous ne laissons pas perdre la récompense de celui qui fait le bien.﴿ [Al-Kahf:30 ]

 

Nous écrivons ces mots avec une bonne opinion d’Allâh جل جلاله, sans pour autant prétendre la purifier auprès de Lui.

 

Nous traçons ces lignes par loyauté, non par faiblesse ; pour préserver son souvenir, non par tristesse ; afin qu’elles soient un témoignage utile et béni en sa faveur, une évocation de sa noble vie et dans l’espoir qu’elles pèsent en sa faveur dans la balance de ses bonnes actions.

 

Qu’il plaise au Miséricordieux de l’envelopper de Sa miséricorde, de faire que ce qu’elle a enduré soit une cause d’élévation en degrés auprès de Lui, et de nous réunir avec elle dans la demeure de Sa miséricorde.

 

Nous l’avons connue patiente et pleine de gratitude.

 

Elle fut éprouvée au début de l’année 1425 de l’hégire (2), et Allâh, dans Sa miséricorde, fit descendre sur elle la patience, le raffermissement et la véritable confiance en Lui (tawakkul).

 

Cela se manifestait clairement dans ses paroles.

 

Sa maladie était à son quatrième stade, le plus critique, et les médecins estimaient qu’il ne lui restait pas plus de six mois à vivre.

 

Malgré cela qu’Allâh lui fasse miséricorde, elle s’employait à recourir à toute cause licite : traitements médicaux de diverses sortes, ruqyas légiférées, aumônes discrètes, et invocations insistantes...

 

Sa certitude quant à la guérison ne faiblissait jamais, et sa bonne opinion d’Allâh ne cessait de l’accompagner !

 

À chaque nouveau rendez-vous médical, elle répétait avec assurance et patience : « Allâh rend les causes bénéfiques, mais nous ne plaçons notre confiance qu’en Lui, le Très- Généreux. »

 

Elle compléta le jeûne du mois de Ramadan, et s’efforça de rattraper les jours qu’elle avait manqués tout en suivant son traitement.

 

Elle les fit suivre du jeûne des six jours de Shawwāl, malgré nos tentatives de l’en dissuader, en raison de son extrême fatigue causée par la maladie.

 

Mais elle refusait toute discussion à ce sujet et mettait immédiatement fin à la conversation.

 

Elle fut admise à l’hôpital le 17 Shawwāl (3), jusqu’à ce que son âme s’élève vers son Seigneur, le samedi 4 Dhū al-Ḥijjah (4).

 

Qu’Allâh lui pardonne et lui fasse miséricorde, qu’Il élève sa mention, fasse de ses épreuves une purification et une élévation en degrés, et qu’Il lui accorde le plus haut degré du Firdaws, sans compte à rendre ni châtiment préalable.

 

Au cours des trois derniers mois de sa vie, la maladie s’aggrava et l’éprouva durement…

 

Pourtant, elle demeura un modèle de patience et de fermeté : elle n’exprima aucune plainte, et ne laissa échapper aucun gémissement…

 

Nous lisions l’intensité de sa souffrance sur les traits de son visage, lorsqu’elle tournait la tête à droite et à gauche, et levait les yeux vers le ciel, comme pour s’entretenir avec son Seigneur et Lui exposer sa plainte…

 

Jamais elle ne nous demandait quoi que ce soit ; son cœur était entièrement attaché à Allâh.

 

Même le médecin nous recommandait d’interpréter les expressions de son visage afin de comprendre si elle avait besoin de calmants, car, même dans la douleur, elle ne disait rien !

 

Et lorsque la douleur s’intensifiait, son cœur de mère se réveillait et elle oubliait sa propre personne pour alléger notre tristesse.

 

Parfois, elle nous rappelait les paroles du Prophète صلى الله عليه وسلم adressées à Abū Bakr dans la grotte :

 

﴾“Ne t’afflige pas, car Allâh est avec nous.”﴿ [At Tawba :40 ]

 

D’autres  fois,  elle  répétait  le  hadith : « Étonnante est l’affaire du croyant… », et réconfortait son âme ainsi que ceux qui l’entouraient par le Coran.

 

Et lorsque l’épreuve pesante descendait sur elle, elle levait son index et répétait, avec une méditation qui touchait les cœurs et les ravivait :

 

﴾N’est-ce pas Lui qui répond à l'homme en détresse quand il L’invoque﴿. [ An-Naml : 62 ]

 

Quand on lui demandait comment elle allait, elle répondait : « Tout ce qui arrive au croyant est un bien ! « Même l’épine qui le pique, Allâh expie par elle une part de ses fautes. » Alors que dire de mon état, avec cette maladie et cette douleur ?! »

 

Il arrive que l’épreuve, lorsqu’elle s’intensifie, détourne le serviteur du rappel d’Allâh, et de l’engagement qu’Il a pris : lui accorder le soulagement et d’exaucer ses invocations, tant le diable exerce une forte pression sur lui en ces instants.

 

C’est pourquoi je lui rappelais souvent : « Combien d’angoisses as- tu traversées, dont Allâh t’a délivrée par Sa miséricorde et Sa grâce ? »

 

Et alors elle se mettait à les énumérer avec moi, le cœur apaisé et serein.

 

Une fois, alors qu’elle était en soins intensifs, nous lui avons rappelé ce qu’elle nous avait enseigné sur la confiance en Allâh.

 

Elle répondit, d’une voix affaiblie mais avec un cœur apaisé :

 

﴾ Et quiconque place sa confiance en Allâh, Il [Allâh] lui suffit. ﴿ [ At Talaq : 3 ]

 

Les médecins furent souvent impressionnés par sa patience, car elle ne se plaignait que de fatigue et de manque de sommeil. Ils lui disaient : « Mā shāʾ Allâh, tu es patiente, Nūrah ! »

 

Même avec les infirmières de l’hôpital, lorsque certaines étaient un peu brusques dans leurs gestes, elle leur disait avec douceur : « Doucement, je suis fatiguée et malade… »

 

Tous furent touchés par son comportement et sa résilience, voyant qu’elle ne s’agaçait pas, et répétait sans cesse : « J’ai l’impression de leur causer trop de travail, ma fille ! »

 

Je lui répondais alors : « C’est leur travail et leur devoir. »

 

L’une d’elles demanda un jour : « Depuis combien de temps est-elle malade ? »

 

Je ne répondis rien et, tandis que ma mère gardait les yeux fermés, elle leva deux doigts !

 

L’infirmière demanda alors : « Deux ans ? » Ma mère répondit « Non… vingt. »

 

Nous l’avons connue comme une ombre bienveillante dans l’épreuve, et nous avons souvent été émerveillés par sa tendresse au cœur même de la douleur !

 

Même alitée, elle nous regardait avec l’œil d’une mère et un cœur chaleureux ; elle caressait nos têtes, serrait dans ses bras celui qui avait besoin de réconfort, diffusait en nous la sérénité et raffermissait notre force…

 

Et lors d’une nuit de patience, elle vit l’un d’entre nous retenir ses larmes en lui faisant ses adieux, et elle ne put fermer l’œil jusqu’à l’aube, puis elle dit : « Annoncez à untel que je vais bien et que je suis en forme. »

 

Et lorsque, une autre fois, une de ses filles entra auprès d’elle, retenant difficilement ses larmes sous l’effet de la peur et de l’inquiétude, elle lui dit, de sa voix éraillée, après avoir retiré son masque à oxygène : « Ô ma tendre fille, tout ce qui arrive au croyant est un bien ! »

 

Elle avait interdit les visites de ses petits- enfants et de ses proches, malgré son profond désir de les voir et ses questions répétées à leur sujet.

 

Elle justifiait cela en disant : « Je ne veux pas que leurs cœurs se serrent à cause de moi, et je n’aime pas qu’ils me voient dans cette faiblesse. »

 

Nous l’avons connue profondément attachée à Allâh et à Sa Parole !

 

La maladie l’avait clouée au lit, mais jamais elle ne faiblissait dans le rappel d’Allâh جل جلاله.

 

Son occupation constante était de dire : « Subḥâna- Llâh (Gloire à Allâh) » (tasbīḥ) et « Al-ḥamdu li- Llâh (Louange à Allâh) » (taḥmīd), et elle répétait avec certitude : « Al-ḥamdu li-Llâh, ḥamda adh-dhâkirīn ash-shâkirīn (Louange à Allâh, telle que la Lui adressent ceux qui L’évoquent et Le remercient). »

 

À mesure que la maladie s’aggravait à la fin de sa vie, ses paroles se faisaient rares ; elle n’était alors plus que dans l’invocation ou le rappel d’Allâh.

 

Elle nous demandait de lui réciter les versets parlant de la sérénité, de lui rappeler les invocations à dire lors des épreuves, et de lui faire répéter les formules de proclamation de l’unicité (Lâ ilâha illa-Llâh).

 

Une fois, alors que l’une de ses filles lui récitait le Coran, elle reprit conscience, retira son masque à oxygène, et demanda à réciter les versets avec elle.

 

Une autre nuit, elle demanda l’heure, et nous l’informâmes que nous étions dans le dernier tiers de la nuit, un moment dédié à l’invocation et à la demande de pardon.

 

Elle s’enquit alors de la direction de la qiblah, orienta son regard vers elle, puis ferma les yeux…

 

Allâh est bien plus miséricordieux envers elle que nous-mêmes, et plus Savant de ce que contenait son cœur.

 

C’est Lui le Proche, l’Audient, Celui qui exauce [les prières].

 

Après avoir repris connaissance alors qu’elle était en soins intensifs, elle demanda avec empressement : « Quelle heure est-il ? Comment puis-je savoir les heures des prières ? » car il n’y avait ni lumière ni horloge dans la pièce.

 

Nous l’avons connue avec un cœur pur et une conduite empreinte de douceur.

 

Elle s’empressait vers le bien, partageait avec les pauvres la subsistance de son propre foyer, assistait aux cercles de rappel malgré la fatigue, et s’efforçait d’entretenir des liens sincères avec les gens du Coran.

 

Elle veillait à maintenir les liens familiaux, et laissa d’ailleurs une empreinte bénie en initiant un rassemblement familial régulier.

 

Elle honorait également les personnes âgées parmi ses proches, ainsi que les proches de ses enfants.

 

Un jour, lors d’un rassemblement familial, et tandis que l’on servait le café, elle préféra en faire profiter un malade.

 

Elle tendit alors le café à son fils et lui demanda d’aller rendre visite à son oncle — qu’Allâh lui pardonne — à l’hôpital, et de boire le café avec lui.

 

Elle lui dit : « Prends le café avec lui, et ne reste pas assis ici avec moi ! »

 

Trois jours avant son décès, elle fut atteinte d’une forte fièvre qui l’épuisa au point de ne plus pouvoir parler ni bouger.

 

Nous lui appliquions des compresses fraîches et tentions d’apaiser sa douleur quand elle releva soudain la tête avec difficulté, et dit d’une voix affaiblie :

 

﴾Mais quiconque pardonne et réforme, son salaire incombe à Allâh﴿ [As-Shura : 40 ]

 

Puis elle reposa sa tête…. et ferma les yeux….

 

Nous implorons Allâh qu’Il élève son rang, qu’Il lui accorde une haute station, et qu’Il la récompense de la meilleure des rétributions qu’Il accorde à Ses serviteurs patients, en quête de Sa récompense, et qu’Il la fasse demeurer dans le plus haut degré du Firdaws, au Paradis, sans jugement ni châtiment préalable.

 

Si ce n’était la certitude d’une seconde rencontre, nos cœurs se seraient brisés de douleur, toutefois nous plaçons notre espoir dans le Bienfaiteur, le Très Miséricordieux, afin qu’Il fasse pleuvoir sur sa tombe Son pardon et Sa miséricorde, et qu’Il nous réunisse avec elle dans la demeure de Sa clémence.

 

Et c’est Lui, le Donateur, le Tout- Miséricordieux.

 

Fin de la lettre.

 

Louange à Allâh, Seigneur des mondes, et que les prières et les salutations d’Allâh soient sur Son serviteur et Messager, notre Prophète Mohammed, ainsi que sur sa famille et l’ensemble de ses compagnons.

 

(1) Le 3 Chaʿbān 1379 de l’hégire correspond au 1er février 1960.

(2) Correspond à l’année 2004

(3) Correspond au mardi 1 avril 2025

(4) Correspond au samedi 31 mai 2025

 

Publié par la chaîne Telegram قناة كونـي سلفيّة على الجادة - @kounisalafiya

Original en Arabe : أخيتي الصابرة

Cheikh 'Abder Razzâq Ibn Abdelmohsin Al 'Abbâd Al Badr - الشيخ عبد الرزاق بن عبد المحسن العباد البدر

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