Comment regagner un bien injustement pris
La question :
Un homme a engagé des ouvriers afin de lui effectuer un travail, puis il ne les a pas rémunérés.
Est-ce qu'il est donc permis à ces ouvriers de regagner leur dû par force, s'ils en ont le pouvoir, ou de le reprendre en cachette s'ils sont impuissants.
Il y a parmi nos frères ceux qui fondent cet acte sur le hadith de Hind lorsqu'elle s'est plainte de son mari auprès du Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم ; De plus, ils attribuent cet avis à Ibn Hazm رحمه الله.
Et merci.
La réponse :
Louange à Allâh, Maître des Mondes; et paix et salut sur celui qu'Allâh a envoyé comme miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu'au Jour de la Résurrection.
Ceci dit :
Ce qui est cité dans votre question est connu dans la science de la Charia par le nom d'Edh-Dhafar [1].
Les opinions des Ulémas divergent au sujet de cette question.
La majorité des Ulémas disent qu'il est recommandé à la personne de ne pas rendre la pareille à celui qui lui nuit, conformément au hadith du Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم rapporté par Abou Hourayra رضي الله عنه :
«Restituez les dépôts aux déposants et ne trahissez pas celui qui vous a trahis» [2].
Et ce qui porte à dire qu'il est recommandé, plusieurs versets indiquant la permission, tel que le verset dans lequel Allâh عزّ وجلّ dit :
وَجَزَاء سَيِّئَةٍ سَيِّئَةٌ مِّثْلُهَا - الشورى: 40
Le sens du verset :
﴾La sanction d'une mauvaise action est une mauvaise action [une peine] identique﴿ [Ech-Choûrâ (La Consultation) : 40]
Ainsi que le verset :
وَإِنْ عَاقَبْتُمْ فَعَاقِبُواْ بِمِثْلِ مَا عُوقِبْتُم بِهِ - النحل: 126
Traduction du sens du verset :
﴾Et si vous punissez, infligez [à l'agresseur] une punition égale au tort qu'il vous a fait﴿ [En-Nahl (Les Abeilles) : 126]
Par ailleurs, l'opinion considérée dans cette question est celle qui annonce qu'il est obligatoire que la personne prenne le taux auquel elle a droit quand elle s'empare du bien de celui qui l'a lésée ; que ce bien soit du même genre du bien qui a été pris ou non, tout en étant équitable envers la personne qui lui a porté préjudice.
La personne lésée doit prendre son dû après avoir vendu le bien dont elle s'est emparée et de rendre le reste à celui qui l'a lésée ou à ses héritiers.
Néanmoins, si le bien vaut moins que ce qui est dû à la personne lésée, le droit de celle-ci restera revendiqué auprès de celui qui l'a lésée, et celui-ci lui demeurera toujours redevable à moins qu'il soit affranchi de cette redevance.
Et ce qui prouve cela dans le Coran, le verset où Allâh عزّ وجلّ dit :
وَلَمَنِ انتَصَرَ بَعْدَ ظُلْمِهِ فَأُوْلَئِكَ مَا عَلَيْهِم مِّن سَبِيلٍ - الشورى: 41
Le sens du verset :
﴾Quant à ceux qui ripostent après avoir été lésés, ... ceux-là pas de voie (recours légal) contre eux﴿ [Ech-Choûrâ (La Consultation) : 41]
Et le verset :
وَالَّذِينَ إِذَا أَصَابَهُمُ الْبَغْيُ هُمْ يَنتَصِرُونَ - الشورى: 39
Le sens du verset :
﴾Et qui, atteints par l'injustice, ripostent﴿ [Ech-Choûrâ (La Consultation) : 39]
Ainsi que le verset :
وَالْحُرُمَاتُ قِصَاصٌ- البقرة : 194
Traduction du sens du verset :
﴾Le talion s'applique à toutes choses sacrées﴿ [El-Baqara (La Vache) : 194]
Et le verset :
فَمَنِ اعْتَدَى عَلَيْكُمْ فَاعْتَدُواْ عَلَيْهِ بِمِثْلِ مَا اعْتَدَى عَلَيْكُمْ - البقرة : 194
Traduction du sens du verset :
﴾Donc, quiconque transgresse contre vous, transgresses contre lui, à transgression égale﴿ [El-Baqara (La Vache) : 194]
Et parmi les hadiths qui soutiennent cela; le hadith rapporté par l'intermédiaire de Hind l'épouse d'Abou Soufiâne et dans lequel le Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم lui a dit :
«Prends avec tempérance ce qui te suffit toi et tes enfants» [3], vu qu'elle a droit aux dépenses.
Aussi, El-Boukhâri a rapporté le hadith du Prophète :
«Si vous vous rendez chez des gens et ils vous offrent ce que l'on doit offrir à l'invité, alors acceptez ce que l'on vous offre.
Cependant, S'ils ne font pas [leur devoir], prenez d'eux ce à quoi l'invité a droit» [4].
Encore, même si l'on considérerait que le hadith rapporté par Abou Hourayra, « … et ne trahissez pas celui qui vous a trahis » mentionné ci-dessus, est authentique, on ne pourrait pas l'utiliser comme argument dans cette question, car le fait que la personne reprenne son droit n'est pas une trahison, c'est plutôt un droit et un devoir.
Toutefois, la trahison est le fait de trahir à tort et à faux celui auprès de qui on a aucun droit ; tel qu'il est déclaré par Ibn Hazm Ed-Dâhiri, suivi par Es-San`âni, en disant :
«… et parmi les arguments qui soutiennent ceci, le hadith du Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم : «Soutiens ton frère qu'il soit opprimé ou oppresseur» [5], car l'ordre mentionné dans ce hadith signifie clairement l'obligation, et le fait de soutenir l'oppresseur consiste à l'écarter de l'oppression et de l'injustice ; et ce, en lui enlevant ce qu'il a pris injustement aux autres [6].
Je dis : ceci est valable à condition que le fait de regagner son droit par ce moyen n'implique pas une nuisance égale ou supérieure à l'intérêt que l'on veut réaliser.
Donc, si cet acte impliquerait une nuisance, il serait interdit conformément à la règle annonçant que :
«Repousser les nuisances passe avant le fait de réaliser les intérêts».
Le savoir parfait appartient à Allâh عزّ وجلّ, et notre dernière invocation est qu'Allâh, Seigneur des Mondes, soit Loué et que prière et salut soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu'au Jour de la Résurrection.
[1] C'est-à-dire : Qu'une personne a droit auprès de quelqu'un et celui-ci ne veut pas le lui donner. Ensuite, l'ayant droit obtient un bien appartenant à celui qui ne voulait pas lui rendre son dû. Serait-il alors permis à cet ayant droit d'extraire son dû de ce bien ou non.
[2] Rapporté par Aboû Dâwoûd dans ses «Sounane», chapitre du «Louage» concernant l'homme qui regagne son argent lorsqu'il tombe dans ses mains (hadith 3535), par Et-Tirmidhi dans ses «Sounane», chapitre des «Ventes» (hadith 1264), par Ed-Dârimi dans ses «Sounane» (hadith 2499) et par El-Hâkim dans «El-Moustadrak» (hadith 2296) par l'intermédiaire d'Abou Hourayra رضي الله عنه. Es-Sakhâwi a dit dans «El-Maqâssid El-Hassana» : «Ibn Mâdjah a dit : ce hadith a six chaînes de transmission qui sont toutes faibles. Je dis : mais en les réunissant, le hadith se renforce». El-Albâni dans «Es-Silsila Es-Sahîha» (hadith 423) a jugé ce hadith authentique par égard à l'ensemble de ses chaînes de transmissions.
[3] Rapporté par El-Boukhâri, chapitre des «Dépenses» concernant le fait que lorsque l'homme ne dépense pas pour sa femme; celle-ci est autorisée de prendre de son argent à son insu (hadith 5364), parMouslim, chapitre des «Sentences» (hadith 4574), par Aboû Dâwoûd, chapitre du «Louage» concernant l'homme qui regagne son argent lorsqu'il tombe dans ses mains (hadith 3534), par En-Nassâ'i, chapitre de «La bienséance des juges» concernant le jugement que rend le gouvernant d'une personne absente quand il (le gouvernant) la connaît (hadith 5437), par Ibn Mâdjah, chapitre des «Commerces» concernant le droit qu'a la femme dans l'argent de son mari (hadith 2381) et par Ahmed (7/60, numéro : 23597) par l’intermédiaire d’Aïcha رضي الله عنها.
[4] Rapporté par El-Boukhâri, chapitre des «Griefs» concernant le fait que la personne lésée récupère son argent lorsqu'elle trouve l'argent de celui qui lui a porté préjudice (hadith 2461), par Mouslim, chapitre de la «Trouvaille» (hadith 4613), par Abou Dâwoûd, chapitre des «Nourritures» à propos de ce qui est rapporté concernant l'accueil de l'invité (3754), par Ibn Mâdjah, chapitre de «La bienséance» concernant les droits de l'invité (hadith 3807) et par Ahmed (5/145) (numéro 16894) par l'intermédiaire de `Ouqba Ibn `Âmir رضي الله عنه.
[5] Rapporté par El-Boukhâri, chapitre des «Griefs» concernant [le propos du Prophète صلّى الله عليه وآلِه وسلّم] : soutiens ton frère qu'il soit opprimé ou oppresseur (hadith 2443), par Et-Tirmidhi, chapitre des «Troubles» (hadith 2421) et par Ahmed (hadith 13421) par l'intermédiaire de Anas Ibn Mâlik رضي الله عنه. Ce hadith est aussi rapporté par Mouslim, chapitre «Le bien, le lien et les bienséances» concernant le fait de soutenir son frère (musulman) qu'il soit opprimé ou oppresseur (hadith 6582) par l'intermédiaire de Djâbir رضي الله عنه.
[6] Voir : «Souboul Es-Salâm» d'ES-San`âni (3/69).
Alger le 19 Ramadan 1417 H, Correspondant au 28 janvier 1997 G
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كيفية استيفاء المال المأخوذ ظلما
السؤال: رجل استأجر أجراء لينجزوا له عملا ثم لم يوفهم حقهم، فهل يجوز لهم أخذ حقهم بالقوة إن استطاعوا أو يأخذونه خفية إن كانوا ضعفاء، ومن إخواننا من خرّج هذا الصنيع على حديث هند عندما شكت زوجها إلى رسول صلى الله عليه وسلم ونسب ذلك إلى ابن حزم -رحمه الله- وشكرا
الجواب: الحمد لله رب العالمين والصلاة والسلام على محمد وعلى آله وصحبه والتابعين لهم بإحسان، أما بعد
فإنّ ما تضمنه فحوى السؤال يعرف بمسألة الظفر، و للعلماء فيها أقوال، والجمهور على استحباب عدم مجازاة من أساء بالإساءة لحديث أبي هريرة - رضي الله عنه– قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: " أدِّ الأمانة إلى من ائتمنك و لا تخن من خانك "(١)، والحامل على القول بالاستحباب آيات تدل على جواز مجازاة السيئة بمثلها ، كقوله تعالى : ﴿وَجَزَاءُ سَيِّئَةٍ سَيِّئَةٌ مِّثْلُهَا﴾[الشورى 40] ﴿وَإِنْ عَاقَبْتُمْ فَعَاقِبُوا بِمِثْلِ مَا عُوْقِبْتُمْ بِهِ﴾[النحل 126] وغيرها
والرأي المعتبر في هذه المسألة القول بوجوب الأخذ قدر حقه من مال ظفر به عند ظالم سواء كان من جنس ما أخذ منه أو من غيره مع إنصاف المظلوم الظالم ، وذلك باستيفاء حقه بعد البيع فما زاد عن حقه رده له أو لورثته، وإن كان دون حقه بقي مطلوبا في ذمة الظالم، ولا يخرج عن هذا الحكم إلا بالتحليل والإبراء
والمعتمد في ذلك قوله تعالى: ﴿وَلَمَنِ انتصَرَ بَعْدَ ظُلْمِهِ فَأُوْلئِكَ مَا عَلَيْهِم مِنْ سَبِيْل﴾[الشورى41] وقوله عز وجل : ﴿والّذِينَ إذَا أَصَابَهُمُ البَغْيُُ هُم يَنْتَصِرُونَ﴾[الشورى39] و بقوله تعالى : ﴿وَالحُرُمَاتُ قِصَاص﴾[البقرة194] وبقوله عز وجل : ﴿ فَمَنِ اعْتَدَى عَلَيْكُم فاعْتَدُوا عَلَيْهِ بِمِثْلِ مَا اعْتَدَى عَلَيْكُم﴾[البقرة 194] أما من الحديث فبقوله (صلى الله عليه وسلم) لهند زوجة أبي سفيان " خذي ما يكفيك وولدك بالمعروف "(٢) لحقها في النفقة ، ولما رواه البخاري : " إن نزلتم بقوم فأمروا لكم بما ينبغي للضيف فاقبلوا، فإن لم يفعلوا فخذوا منهم حق الضيف"(٣
هذا وحديث أبي هريرة المتقدم "ولا تخن من خانك" فعلى تقدير صحته فلا وجه للاحتجاج به في مثل هذه المسألة لأنه لا يعد انتصاف المرء خيانة بل هو حق وواجب و إنما الخيانة أن يخون بالظلم والباطل من لا حق له عنده كذا قرره ابن حزم الظاهري وتبعه الصنعاني فقال: (ويؤيد ما ذهب إليه حديث "أنصر أخاك ظالما أو مظلوما"(٤) فإن الأمر ظاهر في الإيجاب و نصر الظالم بإخراجه عن الظلم وذلك بأخذ ما في يده لغيره ظلما)(٥)
قلت: وهذا كله فيما إذا لم يترتب على استيفاء حقهم بهذا الطريق مفسدة مساوية للمصلحة المراد تحقيقها أو أقوى منها، فإن ترتب على فعلهم مفسدة فلا يجوز عملا بقاعدة "درء المفاسد أولى من جلب المصالح"
و الله أعلم، و صلى الله على محمد وعلى آله و صحبه والتابعين لهم بإحسان وسلم تسليما
الجزائر في : 19 رمضان 1417
الموافق لـ : 28 جانفـي 1997
١- أخرجه أبو داود في «سننه» كتاب الإجارة، باب في الرجل يأخذ حقه من تحت يده: (3535)، والترمذي في «سننه» كتاب البيوع: (1264)، والدارمي في «سننه»: (2499)، والحاكم في «المستدرك»: (2296)، من حديث أبي هريرة رضي الله عنه. قال السخاوي في «المقاصد الحسنة» (51): «قال ابن ماجه: وله طرق ستة كلها ضعيفة، قلت: لكن بانضمامها يقوى الحديث». وصححه الألباني بمجموع طرقه في «السلسلة الصحيحة»: (423).
٢- أخرجه البخاري كتاب النفقات، باب إذا لم ينفق الرجل فللمرأة أن تأخذ بغير علمه(5364)، ومسلم كتاب الأقضية، (4574)، وأبو داود، كتاب الإجارة، باب في الرجل يأخذ حقه تحت يده(3534)، والنسائي في كتاب آداب القضاة، باب قضاء الحاكم على الغائب إذا عرفه(5437)، وابن ماجه: كتاب التجارات، باب ما للمرأة من مال زوجها(2381)، وأحمد (7/60رقم 23597) من حديث عائشة رضي الله عنها.
٣- أخرجه البخاري كتاب المظالم باب قصاص المظلوم إذا وجد مال ظالمه(2461)، ومسلم كتاب اللقطة (4613)، وأبو داود كتاب الأطعمة، باب ما جاء في الضيافة(3754) وابن ماجه: كتاب الأدب، باب حق الضيف(3807)، وأحمد ( 5/145) رقم (16894)، من حديث عقبة بن عامر رضي الله عنه.
٤- أخرجه البخاري في «المظالم»، باب أعن أخاك ظالما أو مظلوما: (2443)، والترمذي في «الفتن»: (2421)، وأحمد: (13421)، من حديث أنس بن مالك رضي الله عنه، وأخرجه مسلم في «البر والصلة والآداب»، باب نصر الأخ ظالما أو مظلوما (6582) من حديث جابر رضي الله عنه.
٥- «سبل السلام» للصنعاني (3/69
الفتوى رقم: 4
الصنف: فتاوى البيوع والمعاملات المالية
Cheikh Abou Abdil-Mou'iz Mouhammad 'Ali Farkouss - الشيخ أبي عبد المعزّ محمد علي فركوس